METIERS DIVERS ET D'AUTREFOIS

La dame pipi est la photographe préférée des branchés

BRAVO YVETTE,VOILA UNE DAME QUE J'AIME DANS SA SIMPLICITE ,NATURELLE ET JE SUIS SUR DE BONNE COMPAGNIE,JE SUIS CONTENT DE LA  CITER.

DES PERSONNES COMME ELLES,NOUS EN AVONS BESOIN ,ET SOMMES BIEN CONTENT DE LES TROUVER.

BONNE CONTINUATION YVETTE

ET BISOUS .

Photo : Yvette Neliaz (Norine Raja)

A 67 ans, Yvette Néliaz n’a rien à envier aux « baby clubbers ». En douze ans, elle s’est imposée comme une figure incontournable de la nuit parisienne. Ancienne dame pipi, elle écume aujourd’hui les soirées branchées de la capitale, son appareil photo à la main pour immortaliser les noctambules.

Elle les met ensuite en scène sur son site Internet devenu la vitrine de ses virées nocturnes.

Look excentrique, franc-parler, dynamisme : Yvette paraît solide comme un roc. Une décennie auparavant, sa vie tournait au désastre.

Après voir perdu ses papiers aux Etats-Unis, elle se retrouve sans identité ni ressources en France. A 55 ans, elle découvre le quotidien des gens de la rue.

Mais sa mère lui a appris à toujours faire face. Chez les Néliaz, il a toujours été interdit de pleurnicher. Alors pas question de se laisser abattre.

La journée, elle harcèle son assistante sociale pour faire avancer son dossier. Le soir, elle dort dans sa voiture. Ses proches ne lui parlent plus. Personne ne croit qu’elle s’en sortira. A son âge, elle est « bonne pour la poubelle ».

Un soir d’hiver pourtant, elle est hébergée par ses amies Juliette Dragon et Jennifer Cardini, Djettes au Pulp, un temple parisien de la musique électro qui a fermé en 2007. Elles lui apprennent que la boîte de nuit recherche une dame pipi. Une aubaine :

« A cette époque, j’étais perturbée par ce qui m’arrivait. Mon cerveau ne fonctionnait qu’à 5 %. J’étais incapable de me concentrer et donc d’exercer un boulot classique. C’était l’emploi idéal. »

Le pire ? Les bobos qui lancent des regards pleins de pitié

Assise sur son tabouret dans les toilettes du Pulp, Yvette décèle le mépris inspiré par son métier. Le pire ? Les « bobos bohèmes » qui lui lancent des regards pleins de pitié et affichent « un sourire compatissant ». Parfois, ils font leur bonne action de la journée en prenant quelques minutes pour discuter avec la pauvre dame pipi, raconte-t-elle.

« Ils étaient même surpris que je sache parler. Pour eux, je ne pouvais qu’être une ancienne droguée ayant atterri là après une cure de désintox. Les accidents de la vie, ils ne connaissent pas. »

Plus âgée, solide, du moins en apparence, Yvette attire parfois les confidences des jeunes. Les clubbers éméchés aiment lui raconter leurs déboires sentimentaux ou familiaux. Yvette écoute, retient mais reste en retrait. Elle préfère observer le ballet des noctambules sans s’impliquer.

Pour tuer le temps, elle s’amuse à prendre en photo ses collègues et ceux qui défilent dans ses toilettes. Son credo : les « snapshots » de l’instant avec des cadrages inattendus. Fuyant le conventionnel, elle ose les clichés en plongée, les compositions loufoques.

En 2001, sur les conseils de Guido, un organisateur de soirées, Yvette expose ses clichés sur les murs de la discothèque. De son poste, elle recueille les réactions positives ou négatives des clients et discute volontiers avec les curieux.

Très vite, les médias parlent de son travail. Le buzz commence. Etre shooté par Yvette devient le nouveau snobisme à la mode.

Parallèlement, elle crée le site internet DamePipi.com. Avec son regard décalé, elle fait revivre ses photos sous forme de diaporamas, commentaires à l’appui.

« Chaque cliché collé était une souffrance qui s’envolait »

HI HI HI HI

Quelques mois après son arrivée, Yvette quitte son emploi mais conserve l’étiquette de dame pipi, sa marque de fabrique. Repérée et courtisée par le monde de l’art, Yvette expose dans des petites galeries, au festival Astropolis de Brest et même au ministère de la Culture en 2007.

« Cette expérience a été très marquante. Je venais tous les soirs accrocher mes photos sur l’installation. Je me suis rendue compte que l’époque du Pulp avait été dure émotionnellement.

Chaque cliché collé était comme une souffrance qui s’envolait. A la dernière, un véritable sentiment de paix m’a envahie. »

Aujourd’hui, l’épisode du Pulp est loin mais reste une « expérience formatrice ». Yvette continue d’alimenter son site, d’écumer fêtes, vernissages et expositions avec la vigueur d’une jeunette.

Elle aime le monde de la nuit, trouve les gens plus « vrais », moins enfermés dans leur carcan social.

Au fil des années, elle a accumulé des centaines de photos de noctambules parisiens, anonymes ou célèbres. Un petit trésor qu’elle compte bien exploiter. Des projets, elle en a plein la tête. Le principal, s’amuser et profiter de la vie au maximum.