REFLEXION

était surtout

a. très jeune ;

b. mouillé comme les autres dans le bain de son temps et de son pays ;

c. influencé parl'abbé Wallez, un ultraconservateur qui veillait à la "pureté doctrinale" du journal où les aventures du petit reporter à houppette furent d'abord publiées.

Du moins pour ses deux premiers albums,Tintin chez les Soviets etTintin au Congo, qui se trouvent être ceux qu'on brandit le plus souvent pour démontrer un supposé racisme.

Dès qu'Hergé commence à grandir et à gagner son indépendance, à partir deTintin en Amérique, le point de vue exprimé change, et le dessinateur se range petit à petit du côté de ceux qu'il considère comme opprimés, quelle que soit la situation.

Dans cet album, on voit les Sioux chassés de leurs terres à coups de mensonges, de fusil, d'aumône et d'avidité pétrolifère "blanche".

Nous sommes en 1932 !

Hergé prendra aussi le parti des Gitans. Dans"Les Bijoux de la Castafiore", ils ne mâchent pas leurs mots pour dénoncer augadjo Tintin les clichés à leur sujet.

La voleuse de bijoux, ce ne sera pasMiarka, la petite Rom.

Question : connaissez-vous beaucoup d'artistes, de politiciens ou de citoyens en Occident à l'heure actuelle qui prennent la défense des "gens du voyage" ?

Haddock représente le râleur au bon cœur et ses préjugés ; Tintin, l'observateur un brin désabusé.

De plus en plus désabusé, même, à l'image d'un Tintin combattant aux côtés desPicaros (dans le dernier album publié) mais qui ne se fait guère d'illusions lors du remplacement d'un gouvernement par un autre.

La dictature, les breloques qu'on s'accroche à la poitrine, l'arrogance et la bêtise sont toujours épinglées par Hergé, d'où qu'elles viennent.

C'est ced'où qu'elles viennent qui dérange aujourd'hui.

Je ne reviens même pas sur l'amitié à la vie, à la mort entre Tintin etTchang

, jeu d'échos émouvant entre fiction et réel.

Oui, Hergé fit parler "petit-nègre" les esclaves deCoke en Stock, puis corrigea ce parti pris douteux dans la seconde version de l'album.

Mais ces esclaves, Tintin les libère, il ne les exploite pas…

Et vous, en achetant uniPhone, vous faites quoi ?

Bien sûr qu'on peut choisir d'être offensé par la caricature. Par les codes culturels d'une époque révolue. Par le foulard ou le maquillage…

Je ne dis pas que toutes les caricatures d'Hergé ont bien vieilli.

Je dis qu'Hergé est quelqu'un qui change et qui apprend.

Et je suis peiné qu'on le réduise à "un raciste". Non seulement parce que raciste, il ne l'est pas ; mais aussi parce que c'est annihiler le concept de nuance ou de satire.

(Sans même compter le fait que l'art n'a pas vocation à êtremoral).

L'énergie dépensée à censurer Georges Remi serait plus utile ailleurs, comme par exemple au Canada, pour faire avancer l'enquête au sujet des orphelinats ou pensionnats et de la façon dont l’État y a traité les "indigènes" entre 1870 et… 1996…

Le Canada ouvre les portes des orphelinats de la honte

(Cette culpabilité latente serait-elle la raison du zèle canadien envers les bandes dessinées franco-belges ?)

Hergé est un universaliste. Il caricature tout le monde :blancs, noirs, hommes, femmes, juifs, Arabes, Grecs, Japonais, Incas, généraux d'opérette, chauffards italiens, assureurs fâcheux, prophètes de malheur, riches ou prolos…

Choisir parmi cette richesse, cette diversité des représentations dans son univers, la caricature qui ME dérange, puis l'agiter comme un étendard en criant au meurtre, vous l'avez tous reconnue :c'est la tactique habituelle, ô combien infantile ! de notre époque.

Enfin, chers commentateurs, si vous n'êtes pas contents :